Nos coins secrets... le viaduc des Rochers Noirs

« Et au-dessous coule une rivière »
Aperçu @DépartementCorrèze

Cet extraordinaire ouvrage d'art, construit jadis pour le passage d’un pittoresque tacot, subjugue par sa qualité architecturale dans un site sauvage et encaissé. Pendant longtemps symbole de désenclavement pour des contrées corréziennes très isolées, il demeure, plus d’un siècle après sa construction, un lieu de contemplation fascinant suscitant aussi une certaine nostalgie.

Retenu en 2020 par la mission BERN et la Fondation du Patrimoine parmi les 18 édifices remarquables à sauvegarder au plan national, il a ensuite été le théâtre d’un vaste chantier de restauration lancé par le département de la Corrèze pour 2 ans en 2022. Avec une réouverture aux mobilités douces à l’occasion de ces JEP 2024, l’heure de la renaissance a sonné pour le viaduc des Rochers Noirs avec une nouvelle destinée touristique sur de bon rails...

Un site impressionnant !

En arrivant de Lapleau et plus encore de Soursac par l’ancienne voie ferrée, l’effet « Waouh » est garanti et le regard est comme aspiré par les gorges de la Luzège entaillant profondément les plateaux environnants. Le site est vertigineux et on n’avait, à l’époque, pas mégoté pour construire dans un resserrement de vallée cet audacieux viaduc.

Ne manquez pas les belvédères aménagés de part et d’autre, notamment celui du jardin de Firmin côté Soursac qui offre une vue en profondeur éblouissante ! Le viaduc, trait d’union entre les deux versants, apparaît alors d’une légèreté et d’une élégance absolues.

La belle histoire...

C’est l’histoire d’une autre époque, où le chemin de fer était la clé du désenclavement d’une région et où les réseaux secondaires à voie métrique étaient soutenus par la politique d’aménagement du territoire (loi Freycinet de 1878). Après moult projets envisagés et tergiversations à la fin du XIXème siècle et au début du XXème, les élus locaux s’accordent sur le tracé du futur Transcorrézien et le décret d’application est finalement publié au Journal Officiel le 30 avril 1908. Tout s’accélère alors et un chantier pharaonique, un des plus importants de la France intérieure en ce début de siècle, s’ouvre en Corrèze. Trois lignes ferroviaires vont être construites dont la plus importante va relier Tulle à Ussel sur 101 km en desservant les campagnes.

Mais, gageure pour l’époque, il faut franchir les gorges de la Luzège entre Lapleau et Soursac et la Compagnie des Tramways de la Corrèze va engendrer un des plus spectaculaires ouvrages d’art jamais construit dans notre département.

Le viaduc des Rochers Noirs sera désormais intimement lié au tortillard, véritable éloge de la lenteur, qui le franchira plusieurs fois par jour jusqu’en 1959. Souvenons-nous aujourd’hui qu’il aura favorisé des échanges économiques et sociaux jusqu’à lors très difficiles dans de nombreuses communes isolées.

Une prouesse technique

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L’ingénieur Albert Gisclard a déjà mis au point un système de pont suspendu donnant toute satisfaction sur une ligne de Cerdagne et cette option technique est retenue aux lieu-dit les « Roches Noires ». Le malheureux ayant péri sur un chantier, la société ARNAUDIN va se charger de la construction et vont s’en suivre, entre 1911 et 1913, de prodigieux travaux dans un site a priori parfaitement inaccessible.

Entre percement d’un tunnel de 140 m dans le granit, approvisionnement des matériaux, édification des piles à 124 m au-dessus du vide, lancement des 158 m du tablier dominant la rivière de 92 m et pose de l’entrelacs de câbles métalliques, les hommes accomplissent des miracles et l’inauguration officielle a lieu en grandes pompes le 11 septembre 1913.

La grande histoire retiendra le Président Raymond Poincaré et son épouse gagnant le viaduc en train, la petite histoire un menu absolument pantagruélique au déjeuner et un objet singulier : une chaise d’aisance spécialement construite pour Mme Poincaré et aujourd’hui précieusement conservée à Lapleau …

Les chemins de la mémoire... et du renouveau

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La concurrence des transports routiers et une incapacité chronique à la rentabilité vont sonner le glas de la ligne en 1959. Au fil des décennies, l’ensemble du patrimoine ferroviaire bâti va irrémédiablement se dégrader et le viaduc, faute d’entretien, n’échappe pas aux assauts du temps… D’abord réaménagé pour un usage routier, il est uniquement réservé à la circulation douce en 1983 puis, pour des raisons de sécurité évidentes, fermé à tout accès depuis 2005.

Propriété du département de la Corrèze, il fait l’objet d’un changement de câble dans les années 80 puis replonge dans une douce torpeur, mais pas dans l’oubli, jusqu’à la fin des années 90. Un dossier de classement aux Monuments Historiques est alors déposé et accepté en 2000 et l’ouvrage d’art retrouve son aspect d’origine après décapage du revêtement routier.

Plusieurs millions d’euros seraient nécessaires à sa remise en état mais on se souvient que seuls 5 ouvrages de ce type subsistent encore au monde et on se prend à rêver de travaux d’ampleur pouvant lui redonner sa fonction originelle. C’est ainsi que les visiteurs continuent d’affluer par milliers chaque année, tant l’endroit est beau et empreint de quiétude, et que l’émission TV du patrimoine culte « Des Racines et des Ailes » vient filmer les lieux en août 2015.

Entre temps, le syndicat du Transcorrézien et la communauté de communes ont aussi apporté leur contribution avec, en point d’orgue, l’aménagement déterminant d’une passerelle himalayenne en contrebas pour rétablir la liaison pédestre d’une rive à l’autre.

Par ailleurs, l’association locale ASTTRE a toujours été aux petits soins avec le viaduc en œuvrant inlassablement à la mise en place d’opérations d’animation, de sauvegarde et de valorisation.  

Pour en savoir plus sur l'association ASTTRE, cliquez ici.

L’année 2020, pourtant si chaotique, va récompenser les efforts entrepris et marque un tournant avec l’aboutissement de deux projets porteurs d’espoirs pour remettre le viaduc sur de bons rails…

Le premier, impliquant ASTTRE et la mairie de Soursac, est un très beau parcours d’interprétation de plusieurs kilomètres en amont de l’ouvrage. Les multiples stations aménagées, avec panneaux explicatifs et bornes sonores, sont de grande qualité et permettent de découvrir l’histoire du Transcorrézien bien sûr mais aussi son environnement. Vivez l’expérience du tunnel en courbe, éclairé et sonorisé, avec atmosphère d’époque et frissons garantis !

Le second, mené conjointement par le département et ASTTRE, permet, comme vu en préambule, une reconnaissance nationale du viaduc des Rochers Noirs par la Mission Bern et la Fondation du Patrimoine. Gage d’un volontarisme affirmé de la collectivité départementale, cette reconnaissance va être le déclencheur d’un chantier spectaculaire de restauration complète de l’ouvrage. Une enveloppe de quelque 10 millions d’euros est dégagée par les partenaires financiers dans la boucle et celle-ci va permettre le magnifique résultat désormais sous nos yeux. Et ce n’est pas tout à fait fini car des aménagements connexes vont être réalisés pour garantir un bon accès aux lieux et des projets touristiques vont aussi se mettre peu à peu en place à des fins d’animation du site.

Une vraie résurrection pour un bâti plus que centenaire et un regain d’intérêt majeur pour ce patrimoine exceptionnel. On n’a pas fini de venir et revenir l’admirer…
 

Pour se renseigner sur les visites                    Pour randonner 

>> Pour jouer 

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